Infrastructures routières et climat

Infrastructures routières et climat

Demain, sous la voiture …. Moins de routes ? Par Célia Corneil, consultante en mobilité durable.

Et si le climat rattrapait la voiture avant que nous ne parvenions à en changer d’usage ?

Et si la nécessité (ou pas) de la construction d’infrastructures routières se résolvait par une incapacité financière des collectivités locales à faire face à l’entretien et la gestion de ces dernières ?

Comment s’adapter ?

Voici quelques réponses issues des articles et rapports que vous retrouverez en bibliographie.

Bonne lecture !

“Pouvoir rouler” face aux aléas climatiques

Avec plus de 80% des kms parcourus sur les déplacements quotidiens et 40% sur la longue distance, l’usage de la voiture en France reste prédominant dans nos déplacements. Et qui dit voiture, dit forcément route.

Aujourd’hui, la relation route-voiture illustre parfaitement le proverbe du “serpent qui se mord la queue” :

– La voiture est un enjeu de taille dans les émissions carbones nationales et participe de la sorte au dérèglement climatique à l’échelle globale.

– Or, le climat et ses aléas – incendie, submersion, température élevée, accélération des cycles gel-dégel dans les territoires de montagne…- s’abattent sur les routes qui subissent des dommages plus importants d’années en années.

Schématiquement : la voiture pollue = contribue au dérèglement climatique = le dérèglement climatique provoque + de dégâts sur l’infrastructure routière = un usage de la voiture moins qualitatif, moins simple (fermeture de routes, provisoire ou définitive), et un usage + onéreux à l’échelle collective.

Financer l’infrastructure

En 2021, Carbone 4 publiait son rapport sur le rôle des infrastructures dans la transition bas-carbone et l’adaptation au changement climatique de la France, 2021 et évaluait le besoin en investissement pour l’adaptation des infrastructures existantes, que cela soit via des travaux préventifs ou curatifs.  En voici la synthèse pour les infrastructures de mobilité, comprenant les infrastructures routières :

Credit : Freepik


Une gestion locale par des collectivités dont les finances sont déjà mises à mal

En France, il ne reste plus que 2% de routes en gestion étatique, les routes sont de plus en plus gérées à un échelon local, communal et départemental. La loi dite “3DS” (2023) a permis le transfert aux départements et aux métropoles d’axes routiers structurants pour les déplacements de proximité. “Au total, ce sont 16 départements et 3 métropoles qui se verront transférer un linéaire cumulé de 1360 kilomètres du réseau routier national, tandis que les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Grand-Est et Occitanie pourront se voir confier, à titre expérimental, la responsabilité de la gestion de près de 1640 km d’autoroutes et routes nationales, dans des conditions prévues par convention avec l’Etat.[1]

Alors que le gouvernement démissionnaire annonce un “nouveau dérapage budgétaire” imputable notamment à l’“augmentation extrêmement rapide des dépenses des collectivités territoriale” (sic. Bruno le Maire et Thomas Cazenave), le financement de l’entretien du réseau routier est et sera un enjeu majeur. Sans parler des nouvelles constructions routières qui semblent vouées à une obsolescence programmée dès leur conception …

Alors que faire ?

Prendre le problème à la racine : l’usage prédominant de la voiture sur l’infrastructure routière

Comme on le voit, le plus émetteur de Co2 n’est pas la construction mais bien l’usage de l’infrastructure qui en est fait.

C’est pourquoi Carbone 4[1] propose trois axes :

Développer de nouveaux usages de la route par le déploiement des infrastructures cyclables notamment

Décarboner l’énergie des véhicules : installer des infrastructures de recharges électriques, pour la voiture et pour le fret, autres infrastructures type hydrogène

Massifier. Exemple : covoiturage, voies dédiées aux transports en commun

Et quid du rail ?

Pour décarboner la route, il faudra que le réseau ferroviaire soit en capacité d’accueillir le développement des trafics (voyageurs et marchandises) ce qui passe, toujours selon Carbone 4 par les remises à niveau des voies, un développement du fret ferroviaire et le développement de lignes, à réfléchir en cohérence avec la transformation des usages attendue (l’empreinte carbone de construction de voies souterraines est élevée).

En somme …

Le risque est toujours de se faire rattraper par le climat plutôt que d’en anticiper les risques.  Développer des solutions alternatives à la voiture individuelle devient un impératif pour éviter aux zones les plus fragiles –rurales, montagne, péri-urbain peu connecté- de se retrouver coupées… Faute de routes sur lesquelles rouler.


Bibliographie et liens utiles  :

Le rôle des infrastructures dans la transition bas-carbone et l’adaptation au changement climatique de la France, Carbone 4, Hélène Chauviré, Alain Grandjean, Jacques Portalier, dec. 2021

“La très coûteuse adaptation des routes françaises à la transition climatique”, Le Monde Olivier Razemon, Benjamin Martinez (infographie) et Floriane Picard (infographie), 17 mars 2024

Risques climatiques, réseaux et interdépendances : le temps d’agir, France Stratégie, 2022

L’entretien des routes nationales et départementales, La Cour des comptes, mars 2022